Quelles raisons avons-nous de vivre ?

 

Faut-il des raisons pour être ?

La semaine dernière, suite aux événements dramatiques qui ont mobilisé nombre d’entre nous, je m’interrogeais sur la question de l’être. Qui suis-je ? Qui ne suis-je pas ? Qui ai-je envie d’être ? Qui les autres aimeraient que je sois ? Aujourd’hui, j’ai envie de poursuivre cette interrogation en m’arrêtant sur ce qui fait qu’un humain peut dire « je suis ».

Pouvoir dire « je suis » ne fait a priori pas partie des ressources des autres espèces vivantes. C’est le propre de l’humain. Et ce qui permet à cet humain de dire « Je suis », c’est sa capacité à prendre du recul et à s’auto-comprendre. Cette prise de recul (dont une des manifestations est l’humour !) conduit l’humain à chercher un sens en dehors de lui-même. On peut dire que ce qui distingue l’humain des autres espèces vivantes, c’est sa capacité à donner du sens à sa vie.

Qu’est-ce qui me fait vivre ? Qu’est-ce qui me fait mourir ?

Viktor Frankl (1905-1997), neurologue et psychiatre, rescapé des camps de concentration, a pu observer que, dans ces camps, étonnamment, ceux qui résistaient le mieux et restaient en vie n’étaient pas ceux qui avaient la meilleure condition physique mais ceux qui avaient une raison de rester vivants. Lui-même sait que ce qui lui a donné la force de se maintenir en vie a été, d’une part, l’amour qu’il éprouvait pour sa jeune épouse, d’autre part la réécriture et la publication d’un ouvrage qui lui avait été enlevé à son entrée au camp et détruit par les nazis.

De cette expérience, il a tiré des idées directrices qui lui ont permis d’inventer une forme de thérapie qui a son fondement non sur la volonté de plaisir (comme l’a formulé Freud) ou sur la volonté de puissance (comme l’a formulé Adler) mais sur la volonté de trouver un sens. Il s’est aperçu, aussi bien dans l’expérience concentrationnaire que dans sa pratique médicale, que la plupart des gens sont malades d’absence de sens, du sentiment de vide existentiel. Et comme ce sentiment est insupportable, celui qui le ressent, pour l’éviter, risque de s’engouffrer dans un sens produit par d’autres et devenir ainsi le jouet du conformisme et/ou du totalitarisme.

Savoir pourquoi je vis pour savoir pourquoi j’agis

Il semblerait que je ne puisse affirmer un « je suis » original et singulier que si j’ai une ou des raisons de vivre originales et singulières (même si ces raisons de vivre sont les mêmes que celles de mon voisin, je les choisis et m’en saisis d’une façon originale et singulière – la mienne –  et non pour faire comme mon voisin ou parce que mon voisin pense que c’est bien que je les intègre).

Les diverses manifestations collectives de la semaine dernière ont été des prises de positions contre une forme du totalitarisme. C’était important qu’une parole commune soit élevée contre l’horreur. Mais le risque de telles manifestations est qu’elles ne se réduisent, finalement, à un conformisme de circonstance fondée sur l’émotion commune. Pour qu’elles gardent toute leur pertinence, il est indispensable, il me semble, qu’elles débouchent concrètement sur une recherche de sens pour chacun et, à un niveau plus vaste, pour la société et le monde. Il me semble indispensable de sortir de la chaleur de la foule pour prendre du recul, chacun pour soi, afin de se demander : « quel sens de la vie me motive à prendre part, au moment des événements, puis à contribuer, au-delà des événements ? ».

Dans cette perspective, j’ai envie de vous partager :

  • Une occasion de prise de recul et de réflexion, un entretien de Boris Cyrulnick, – un homme, comme Frankl, victime donc du totalitarisme et rescapé des camps de la mort, – sur tv7
  • Une occasion d’engagement envers soi-même et envers les autres pour 2015 proposée par Avaaz : Trois résolutions qui peuvent changer le monde

Alors, pour vous, quel est le sens de la vie ? Quelles raisons avez-vous de vivre ?