Je salue le dieu qui est en toi

namasté

C’est à travers la jolie formule « Namasté » ( qui se traduit habituellement par je salue le dieu qui est en toi), qu’au Népal on se salue, les deux mains réunies sur le cœur et la tête légèrement inclinée, le matin, le midi, le soir …

Saluer le divin en l’autre : une façon de ne pas voir le mal partout ?

Pour les Népalais, il n’est pas question d’un dieu précis, d’un dieu « confessionnel » et exclusif au nom duquel on se sépare des autres. C’est tout l’inverse. Le Népal est le pays par excellence où vivent en bonne intelligence Hindouisme, Bouddhisme, Islam et Christianisme, dans des versions – en particulier pour les deux premiers, majoritaires -, qui sont loin d’être de « purs produits sans adjonction » ! Au contraire, chacun emprunte aux autres ce qui peut le nourrir et l’enrichir.

tika d'arrivée

Là-bas, le sacré, omniprésent, ne se coupe pas du profane. Il est là dans tous les moments et dans tous les lieux de vie. Il se manifeste, entre autre, dans la bénédiction qui prend la forme du « tika », une marque rouge sur le front. On m’a offert cette bénédiction quand je suis arrivée au centre pour la formation, les parents l’offrent à leurs enfants, les frères et sœurs se l’offrent entre eux, et chacun, enfants, hommes et femmes, arborent au quotidien ces marques de bénédiction, ces témoignages que quelqu’un les a bénis, c’est-à-dire a dit du bien sur eux, pour eux.

Voir l’invisible pour oser l’impossible

Saluer le dieu qui est en l’autre, dire du bien de et à cet autre et se montrer aux autres comme quelqu’un qui est béni : n’est-ce pas une jolie façon de se tenir dans la vie ?

tikas

Une façon qui manque sans doute chez nous, pays de la raison, qui oublie l’adage selon lequel « seuls ceux qui voient l’invisible sont capables de l’impossible ». Une façon qui me touche d’autant plus qu’elle a à voir avec la créativité.

Qu’est-ce qu’un dieu, sinon un créateur ? Dans la majorité des corpus religieux, la divinité est celle qui fait exister, qui crée le monde. Alors, saluer le dieu qui est en l’autre, n’est-ce pas saluer le créateur qui est en l’autre ? Celui qui peut l’impossible parce qu’il voit l’invisible ? Celui qui ose laisser parler ses émotions, son intuition, son imaginaire, pour inventer le monde ?

Et sortir du toujours plus de la même chose

Et n’est-ce pas de cela dont notre monde a besoin ? Plutôt que, comme l’a mis en lumière Paul Watzlawick, nous continuions, individuellement et collectivement, à nous fourvoyer en nous obstinant à « faire toujours plus de même chose » dans l’illusion que c’est cela qui va apporter du changement (toujours plus de sécurité, toujours plus de frappes, par exemple en ce moment !), peut-être pourrions-nous laisser s’exprimer « le dieu qui est en nous » ? 

Et alors, qui sait, il se pourrait que nous ouvrions enfin, ce faisant, la porte à des idées, des solutions, des façons de vivre originales et créatives, c’est-à-dire vivantes. Car créer est le contraire de mourir, non, quelle que soit la forme que prend la mort (même et surtout quand elle se donne l’apparence de la vie) ?